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Le Castor Astral, Collection Escales des Lettres, 96 pages, octobre 2011, 12€

En voyage d’affaires à Dubaï, Jack Janssens, homme d'affaires, voit son monde s’effondrer, à la veille des ses 60 ans. Il vit alors une brève parenthèse au Yémen en confiant à son ordinateur portable - qu'il personnifie en le baptisant Monsieur Presario - ses regrets, ses doutes et ses délires tout en s’adonnant au qat, plante aux vertus "euphorisantes".
Voici le "pitch" du deuxième roman d' Edouard C. Peeters qui prend la forme d'un monologue, d'une confession.
Le très beau titre - qui aurait pu être celui d'un roman de Tim Roth ou de Paul Auster - a une origine scientifique. En effet, "les fameux trous noirs sont des régions de l’espace où la matière est si concentrée que rien n’échappe à son attraction et tout ce qui gravite dans les parages d’un trou noir y tombe et disparaît à jamais. Le disque recouvrant l’orifice du trou noir est appelé horizon des événements ". Quelle belle métaphore pour cet homme qui se retrouve déstabilisé, en rupture avec tout son monde qui s’effondre autour de lui. Alors, situé sur cet « horizon des événements », il va se faire happer, tomber dans le trou noir. Seul témoin de cette chute libre: son ordinateur.
Si le premier roman d'Edouard C. Peeters, « Nephros », paru il y a six ans (sélectionné par le Festival du premier roman à Chambéry et finaliste du Prix des cinq continents) flirtait trop avec un certain académisme, dans la forme et dans l'histoire, ici on vole beaucoup plus haut car l'originalité est présente non seulement dans la forme, dans cette écriture parlée et littéraire à la fois , mais aussi dans le contenu.
Certes, on pourrait parler de critique du capitalismetrès présente dans ce roman, mais ce sont pas les pages les plus intéressantes du roman, car trop convenues. En fait, les passages les plus beaux, les plus intéressants, ceux qui nous touchent le plus, ce sont ceux qui nous parlent des fragments de vie de ce personnage, de son mal-être, de ses balades dans la nuit, de ce qu'il nous dit du qat, de ces envolées vers Dubaï et vers le Yémen qui semblent très présentes.
Et on atteint le sommet avec le dernier e-mail qui clôt le roman, où tout se résout, où la boucle se referme avec ce secret, enfoui tout au fond du personnage, qui explose au grand jour, parcourt ces kilomètres virtuels qui séparent deux ordinateurs, et subitement explique tout ce qui a été le moteur de la vie de Jack, mais aussi la cause de son échec et la raison pour laquelle il ne peut rester sur cet « horizon des événements » et doit inévitablement tomber dans le trou noir.
Un roman à découvrir et à partager, loin des tam-tams médiatiques.

Les anciens Coups de coeur